Haïti : le gang « Gran Grif » massacre aveuglément des habitants suite à des extorsion infructueuses
Les médias haïtiens parlent d’une «nuit de terreur» à Pont Sondé, localité du département de l’Artibonite, dans l’ouest de Haïti, à une centaine de kilomètres de la capitale Port-au-Prince. «Des membres du gang Gran Grif, munis de fusils automatiques, ont tiré sur la population, tuant au moins 70 personnes, dont environ 10 femmes et trois nourrissons», a indiqué ce vendredi 4 octobre un communiqué du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme. Seize blessés graves seraient soignés à l’hôpital de Saint-Marc, la commune dont dépend Pont Sondé et où ont afflué des dizaines de survivants terrorisés.
La fusillade aurait débuté jeudi vers 3 heures du matin. Le groupe criminel dénommé Gran Grif est dirigé par Luckson Elan, que les Nations unies ont ajouté mercredi à la liste de personnes sanctionnées pour leur rôle dans la violence qui ravage le pays et le trafic d’armes. Le département du Trésor américain avait déjà placé sous sanctions le chef du gang en septembre, en compagnie d’un ancien député, Victor Prophane, présenté comme le parrain de Gran Grif.
Enlèvements ou racket dans les autobus
Si l’agglomération de Port-au-Prince est contrôlée à 80 % par les gangs, la proche région de l’Artibonite subit elle aussi la loi de plusieurs groupes criminels : Gran Grif, dont le quartier général est le village de Savien, Ti Grif, basé à Liancourt, ou Kokorat San Ras, de la Croix-Périsse. L’une des activités de ces bandes consiste à installer des barrages sur la nationale 1, qui relie Port-au-Prince à Cap-Haïtien, la deuxième ville du pays, et d’enlever ou de racketter les passagers des autobus.
Un groupe d’autodéfense, la Coalition du bas Artibonite, mené par l’activiste Jean Denis, s’est formé pour se substituer à une police le plus souvent absente. En septembre 2023, les forces de l’ordre avaient affirmé avoir, dans une opération conjointe avec la Coalition, abattu 30 membres de Gran Grif, un chiffre invérifiable que les médias avaient mis en doute.
La semaine dernière, le gang avait tué en plein jour plusieurs personnes (entre 3 et 8 suivant les sources) à Kado, dans un contexte d’affaiblissement du mouvement d’autodéfense lié à des à «divisions claniques de la Coalition de Jean Denis, dues à la gestion douteuse des dons économiques de citoyens honnêtes de la diaspora», selon la presse locale
Malgré l’installation en juin d’une Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti, composée pour l’essentiel de policiers kényans, la pression des gangs sur la population ne faiblit pas. Au moins 3 661 personnes ont été tuées entre janvier et juin dans le pays, a indiqué le Haut-Commissariat de l’ONU la semaine dernière, un niveau de violence égal à celui constaté en 2023.
De nouveaux effectifs d’ici janvier
La vague de violence et une situation humanitaire catastrophique ont forcé plus de 700 000 personnes, pour moitié des enfants, à fuir leur domicile pour trouver refuge ailleurs dans le pays, selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations publiés mercredi. La violence et l’extorsion forcent les agriculteurs à abandonner leurs terres, alors que l’ONU estime que 1,6 million de Haïtiens sont confrontés à une insécurité alimentaire aiguë.
Le président kényan William Ruto a assuré jeudi 26 septembre à la tribune de l’ONU à New York que son pays terminerait «d’ici janvier» 2025 le déploiement des contingents supplémentaires de la MMAS pour atteindre 2 500 policiers. Des effectifs venus de Jamaïque et du Belize sont déjà sur place, et devraient être rejoints par des troupes venues de Guinée et du Salvador. Mais le président kenyan avait souligné que l’action de cette force de soutien à la police nationale était «entravée par un manque d’équipements, de logistique et de fonds».
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