Malgré des tensions persistantes dans le secteur en raison de la flambée des cours du cacao, la Côte d'Ivoire, premier producteur mondial, affiche une récolte en nette progression.
La campagne principale de commercialisation du cacao ivoirien pour la saison 2024-2025 dresse un bilan contrasté. Si les volumes de production repartent à la hausse, les relations entre les multinationales et les acteurs locaux restent tendues. Démarrée le 1er octobre et s'achevant le 31 mars, cette saison devrait enregistrer une production supérieure à 1,45 million de tonnes, contre environ 1,29 million lors de la campagne précédente.
Cette augmentation de la production intervient dans un contexte de forte pression sur les grandes entreprises du secteur, notamment Cargill, Olam et Barry Callebaut. Les autorités ivoiriennes cherchent à rééquilibrer les rapports de force afin d'assurer une meilleure rémunération aux producteurs locaux, tout en maintenant la compétitivité du pays sur le marché mondial.
Des revendications sociales de plus en plus fortes
Les tensions entre les producteurs de cacao et les multinationales ne se limitent pas à la question des volumes de récolte. Plusieurs mouvements de protestation ont marqué la campagne 2024-2025, traduisant le malaise grandissant des producteurs face à leur rémunération et aux réglementations internationales.
En septembre 2024, l'Association Nationale des Producteurs de Café-Cacao de Côte d'Ivoire (ANAPROCI) a organisé une assemblée générale extraordinaire à Daloa. Les producteurs ont demandé une révision du prix d'achat bord champ, réclamant qu'il représente au moins 60 % du prix CAF. Ils estiment que la flambée des cours mondiaux ne se reflète pas suffisamment dans leurs revenus.
En mars 2024, le Syndicat National Agricole pour le Progrès en Côte d'Ivoire (SYNAPCI) a, lui aussi, exprimé son mécontentement face à une note du Conseil Café-Cacao (CCC) interdisant les surpaiements et imposant des prix fixes. Les producteurs ont jugé ces mesures inéquitables et ont demandé la démission du directeur général du CCC, Yves Brahima Koné.
Les défis réglementaires et environnementaux
Parallèlement à ces tensions, les nouvelles exigences environnementales de l'Union européenne suscitent l'inquiétude. Une réglementation, effective en janvier 2025, interdira l'importation de produits issus de la déforestation. En septembre 2024, industriels du cacao et pays exportateurs se sont réunis à Abidjan pour discuter d'un éventuel report de deux ans, estimant que les exigences, telles que la géolocalisation des parcelles et la traçabilité, étaient trop lourdes à mettre en place immédiatement.
Le fléau du trafic de cacao
Enfin, un autre problème inquiète les producteurs ivoiriens : le trafic de cacao vers les pays frontaliers. En décembre 2024, plusieurs syndicats de l'Ouest ivoirien ont alerté les autorités sur des exportations illégales vers la Guinée et le Liberia. Selon eux, plusieurs milliers de tonnes de cacao ont déjà été exportées frauduleusement depuis le début de la campagne.
Un secteur en pleine mutation
Ces différentes contestations illustrent les nombreux défis auxquels fait face la filière cacao en Côte d'Ivoire. Entre la nécessité d'une rémunération plus équitable, les contraintes réglementaires et les problématiques internes à la filière, les producteurs ivoiriens tentent de faire entendre leur voix dans un marché dominé par les grandes multinationales.
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