Chikungunya : à La Réunion, des cas suspects de seconde infection inquiètent

 

Alors que l’épidémie de chikungunya s’intensifie à La Réunion, des témoignages de Réunionnais affirmant avoir contracté le virus une seconde fois viennent semer le doute. Ces malades disent reconnaître les mêmes symptômes qu’en 2005-2006, lors de la première grande vague épidémique : fièvre élevée, douleurs articulaires, éruptions cutanées. Une situation qui interroge, tant sur le plan médical que scientifique.

Une immunité à vie ? Pas si sûr

L’Agence Régionale de Santé (ARS) reste formelle : il est impossible de contracter deux fois le chikungunya. "Une fois infectée et guérie, une personne développe une immunité durable", rappelle Xavier de Paris, directeur de la veille sanitaire à l’ARS. Une affirmation répétée depuis le début de l’épidémie actuelle.

Mais certains scientifiques tempèrent cette certitude. Le Dr Patrick Mavingui, directeur de recherches au CNRS à l’université de La Réunion, reconnaît que la réinfection est rare, mais pas exclue. "La probabilité est très faible, mais elle existe", affirme-t-il. "Comme pour les vaccins, une petite partie de la population ne produit pas d’anticorps neutralisants. En Afrique, certaines études ont identifié jusqu’à 4 % de cas secondaires."

L’enjeu des preuves

Le chercheur reste toutefois prudent : aucune réinfection n’a été formellement prouvée à La Réunion. Pour cela, il faudrait une sérologie datant de 2005-2006 et un test PCR positif aujourd’hui. Or, à l’époque, peu de patients avaient effectué de tels examens. Sans preuve biologique, difficile donc de trancher.

L’ARS rappelle que seul un diagnostic établi en laboratoire permet de confirmer une infection. "Les analyses prescrites par un médecin restent indispensables pour établir un diagnostic fiable", insiste l’agence.

Une flambée inquiétante

Pendant ce temps, l’épidémie poursuit sa progression. Entre le 24 et le 30 mars, 6 289 nouveaux cas ont été enregistrés, accompagnés de 22 000 consultations et d’une forte hausse des hospitalisations, qui ont doublé en une semaine. Tous les indicateurs sont en nette augmentation.

Depuis sa découverte en Tanzanie en 1952, le virus du chikungunya a circulé dans plus de 60 pays à travers le monde, de l’Afrique aux Amériques, en passant par l’Asie et l’Europe. À La Réunion, il signe un retour fracassant — et soulève, à nouveau, de nombreuses questions.

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