Le 31 mars 2011, Mayotte devenait officiellement le 101e département français. Quatorze ans plus tard, son statut institutionnel continue de susciter des débats tant au niveau local qu'au sein du gouvernement. Entre dérogations et exceptions, l’île se trouve toujours à la croisée des chemins.
Une histoire marquée par des décisions politiques successives
L'histoire de Mayotte avec la France remonte à 1841, lorsque le sultan Andriantsouli, sous la menace des royaumes voisins, cède l'île à la France, qui la place sous protectorat. En 1886, les autres îles de l’archipel des Comores (Mohéli, Anjouan et la Grande Comore) passent à leur tour sous administration française.
Après la Seconde Guerre mondiale, en 1946, les quatre îles sont réunies sous une même entité administrative en tant que territoire d’Outre-mer (TOM), tandis que d'autres régions comme La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane deviennent des départements. Cependant, Mayotte commence à exprimer son souhait d'un destin différent dès 1958, lors du référendum sur la Ve République. Craignant une domination des autres îles, les Mahorais militent pour une départementalisation, mouvement porté par le congrès des notables.
L'indépendance des Comores en 1975 ne fait qu'accentuer la volonté de Mayotte de rester française. Un référendum organisé en 1976 confirme cette volonté avec 99,4% des voix en faveur du maintien dans la France, aboutissant au statut de collectivité territoriale d’Outre-mer.
De collectivité territoriale à département français
Les décennies suivantes marquent une progression vers le statut de département. En 2000, un référendum valide le passage à une collectivité départementale. En 2009, un second référendum donne le feu vert à la départementalisation avec une large majorité. Le 31 mars 2011, Mayotte devient officiellement le 101e département français, un événement célébré par une population enthousiaste.
Un département aux réalités particulières
Malgré son statut, Mayotte reste un département à part, où les lois françaises s'appliquent avec des ajustements. Le Smic y est inférieur à celui de la métropole (1 334 euros brut contre 1 776 euros), le RSA plafonne à 303 euros, et les pensions de retraite restent faibles (276 euros en moyenne en 2023).
L'immigration clandestine y est un enjeu majeur, donnant lieu à des mesures exceptionnelles. Les titres de séjour délivrés à Mayotte ne permettent pas de circuler librement en France, et l'accès au droit du sol est restreint à une condition de résidence d'au moins trois mois pour l'un des parents, durée qui pourrait passer à un an avec une nouvelle loi en discussion.
Vers une évolution du statut ?
Le gouvernement envisage aujourd’hui une transformation institutionnelle pour Mayotte. Actuellement, le conseil départemental exerce certaines compétences régionales, et l'exécutif souhaite instaurer un statut de "département-région" avec une assemblée unique de 52 membres. Cette organisation existe déjà en Martinique, mais soulève des critiques à Mayotte. Le conseiller départemental Soula Said Souffou dénonce ainsi "un vernis sur un statut qui reste dérogatoire" et appelle à un débat plus large sur l’avenir de l’île.
Les Mahorais, eux, restent attentifs et mobilisés. Depuis 2011, plusieurs mouvements sociaux ont secoué le territoire, réclamant des solutions contre la vie chère, l'insécurité et l'immigration clandestine. L'histoire de Mayotte n'est pas figée, et son avenir institutionnel reste une question ouverte.
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