« Qui détient le pouvoir, et comment l’exerce-t-on ? »
Pour Ianeita White, spécialiste des dynamiques comportementales, la maltraitance ne réside pas toujours dans un acte brutal, mais dans un déséquilibre structurel : « Le pouvoir et la coercition ne se manifestent pas seulement dans les faits divers ou les cas extrêmes. Ils se glissent discrètement dans le quotidien de nombreuses relations, souvent idéalisés, presque invisibles. »
Ce déséquilibre est souvent ancré dans des schémas de genre profondément intégrés : des hommes socialisés pour diriger, décider, dominer ; des femmes conditionnées à plaire, s’adapter, éviter le conflit. Ce terrain prépare une forme de manipulation affective et psychologique, qui peut ronger l’autonomie d’une personne sans jamais ressembler à une agression.
La coercition ordinaire : quand l’amour devient un levier
« Si tu m’aimais, tu ferais ça… » Derrière cette phrase apparemment banale se cache une logique de chantage émotionnel. Pour White, ce genre de manipulation peut concerner le sexe, le pardon, ou le renoncement à ses propres limites : « L’amour ne devrait jamais être un outil de négociation. »
Autre exemple : des critiques répétées sur vos tenues ou vos fréquentations, dissimulées sous une prétendue attention. « Ce n’est pas de la protection, c’est du contrôle », affirme White. Et lorsque votre partenaire vous fait culpabiliser de voir vos amis ou de réclamer de l’espace, ce n’est pas de la tendresse : c’est de l’isolement. Même la surveillance du téléphone ou des réseaux sociaux, sous couvert de transparence, révèle une prise de pouvoir : « Si votre partenaire exige un accès à votre intimité numérique, il faut se demander à qui profite réellement cette transparence. »
Des signes discrets mais révélateurs
La maltraitance ne commence pas toujours par des actes violents. « Elle débute souvent par un sentiment diffus, un malaise que l’on refoule sans trop savoir pourquoi », explique White. Elle invite à être attentif à certains signaux d’alerte dans une relation :
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Vous avez constamment l’impression de marcher sur des œufs.
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Vos limites sont repoussées ou ignorées.
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On vous pousse à des choix sexuels, émotionnels ou financiers qui ne vous conviennent pas.
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Vos réactions sont systématiquement tournées en dérision : *« Tu dramatises », *« Tu es trop sensible ».
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Vous vous éloignez de vos proches, ou vous vous sentez déconnecté de vos soutiens habituels.
Selon White, ces dynamiques ne font que s’intensifier avec le temps, jusqu’à parfois basculer dans des formes plus explicites de violence. « Ce qui commence comme un contrôle subtil peut évoluer, surtout lorsque le pouvoir en place n’est jamais remis en question. »
Ce n’est pas une guerre des sexes
White insiste : « Il ne s’agit pas d’accuser les hommes, ni de figer les femmes dans une posture de victime. Il s’agit de nommer des mécanismes tellement normalisés qu’ils échappent à notre vigilance, jusqu’à ce que quelqu’un en paie le prix. »
Elle rappelle que les relations saines reposent sur trois piliers essentiels : le respect mutuel, la liberté et la sécurité. « Ce n’est ni la peur, ni l’obligation, ni le contrôle qui construisent une intimité durable. »
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