Les minerais extraits en Afrique centrale — coltan, cuivre, or — sont essentiels à nos technologies du quotidien. Pourtant, leur traçabilité reste difficile, malgré les efforts des ONG, des institutions internationales et la pression croissante exercée sur les entreprises pour qu’elles respectent leur devoir de vigilance.
Une chaîne d’approvisionnement toujours opaque
La société luxembourgeoise Traxys a récemment été ciblée par l’ONG Global Witness, qui l’accuse d’avoir acheté plusieurs centaines de tonnes de coltan au Rwanda, potentiellement issues de mines congolaises illégales, notamment celle de Rubaya, dans une région marquée par des conflits armés.
Traxys a nié toute irrégularité, mais l’affaire met en lumière une réalité persistante : les chaînes d’approvisionnement dans la région restent largement opaques. Pour tenter d’y remédier, les entreprises peuvent s’appuyer sur le guide de diligence raisonnable de l’OCDE, qui recommande des pratiques dites "responsables" en matière d’approvisionnement.
« La transparence progresse, et les entreprises prennent de plus en plus au sérieux leur responsabilité », estime Karim Dahou, directeur adjoint des relations mondiales à l’OCDE.
Il cite le cas d’une mine de cuivre dont le projet — évalué à trois milliards de tonnes de réserves — a été suspendu par une cour constitutionnelle, en raison de l’absence de consultation des communautés locales dans une zone protégée.
« Beaucoup de projets sont aujourd’hui retardés ou annulés pour non-respect des normes environnementales et sociales », souligne-t-il.
Des actions en justice contre les géants du numérique
La République démocratique du Congo a également recours à la justice pour défendre ses intérêts. Elle a déposé plainte en France et en Belgique contre des filiales d’Apple, qu’elle accuse de complicité dans le recel de minerais illégalement extraits dans l’est du pays. Le géant américain affirme avoir suspendu ses achats en provenance de la RDC et du Rwanda.
En France, la plainte a été classée sans suite en février, mais la procédure se poursuit en Belgique.
Sur le terrain, des programmes pour suivre les flux
Certaines initiatives tentent d’améliorer la traçabilité depuis la mine jusqu’à l’utilisateur final. C’est le cas du programme ITSCI, piloté par Mickaël Daudin, qui accompagne les entreprises dans leur démarche de vigilance sur le terrain.
« Le cœur de notre travail, c’est d’être dans les mines, de surveiller les risques au quotidien et d’y répondre de façon transparente. Aucune solution n’est parfaite, mais détourner le regard ne fera pas disparaître les abus », affirme-t-il.
Une pression croissante, mais des progrès fragiles
Alors que la demande en minerais stratégiques explose, notamment pour les technologies vertes et numériques, la pression monte sur les multinationales pour qu’elles garantissent une extraction éthique et durable. Entre contrôles renforcés, recours juridiques et initiatives de terrain, les progrès sont réels, mais encore loin d’être généralisés.
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