RDC – M23 : après la déclaration de Doha, les véritables négociations commencent

 

La signature d’une déclaration de principes samedi à Doha entre le gouvernement congolais et le groupe armé AFC/M23 marque une étape importante vers une possible résolution du conflit à l’est de la République démocratique du Congo. Mais ce document, s’il pose les bases du dialogue, laisse ouvertes plusieurs questions sensibles, notamment celle de la restauration de l’autorité de l’État.

Autorité de l’État : un principe accepté, des interprétations divergentes

Parmi les points les plus délicats figure le retour de l’administration congolaise dans les zones contrôlées par l’AFC/M23. Officiellement, le principe est acté, mais sa mise en œuvre reste floue. Sur le terrain, le M23 maintient une administration parallèle, nomme ses propres responsables locaux et tente même de mettre en place un circuit bancaire. Le mouvement a réaffirmé qu’il n’envisageait pas de quitter les territoires qu’il contrôle.

Contrairement aux précédentes discussions où Kinshasa exigeait un retrait préalable des grandes villes comme Goma ou Bukavu, la déclaration signée à Doha n’utilise pas le terme de "retrait". Elle mentionne uniquement un cessez-le-feu permanent et l’interdiction de toute avancée territoriale.

La restitution de l’autorité de l’État est ainsi repoussée à l’étape suivante du processus : un accord de paix global, à négocier d’ici le 17 août, avec l’ouverture des pourparlers prévue au plus tard le 8 août. Cet accord devra définir les modalités, le calendrier et les étapes concrètes de cette restauration.

« Créer les conditions d’une paix durable »

Pour de nombreux observateurs, le vrai défi commence maintenant. Si la déclaration de Doha est un progrès sur le plan diplomatique, les discussions à venir s’annoncent complexes, souligne le professeur Martin Ziakwau de l’Université catholique du Congo.

« Le plus important n’est pas la fin des hostilités militaires, mais la mise en place des conditions d’une paix durable », affirme-t-il.

Il insiste sur le fait que l’accord final devra être inclusif, intégrant les autres parties prenantes du processus de Nairobi, notamment les communautés locales et les groupes armés encore actifs dans l’est du pays.

« Si ces acteurs ne soutiennent pas les discussions avec le M23, cela pourrait provoquer un rééquilibrage des alliances sur le terrain et faire capoter les efforts de paix », avertit-il.

Kigali salue un « pas significatif »

Du côté du Rwanda, régulièrement accusé de soutenir le M23, le ton est à l’apaisement. Dans un communiqué, le ministère rwandais des Affaires étrangères salue un « pas significatif vers une résolution pacifique », tout en félicitant le Qatar, médiateur des négociations, avec le soutien des États-Unis. Le ministre de l’Intérieur rwandais, Vincent Biruta, a assisté aux discussions en tant qu’observateur.

Dans un message publié sur X (ex-Twitter), le chef de la diplomatie rwandaise, Olivier Nduhungirehe, a précisé que la question de l’AFC/M23 sera désormais traitée par le dialogue, afin de s’attaquer aux causes profondes du conflit. Il voit dans ce processus la suite logique de la restauration de l’autorité étatique en RDC.

Entre espoirs et incertitudes

Malgré cet élan diplomatique, de nombreuses incertitudes demeurent : le niveau d’engagement des différents acteurs, les garanties de sécurité pour les populations civiles, ou encore le respect des engagements sur le terrain.

La signature de la déclaration de Doha est un pas en avant, mais la route vers une paix durable reste semée d’embûches. Tout dépendra désormais de la capacité des parties à transformer ce texte de principes en engagements concrets et partagés.

Commentaires