Afin d'incarner le nouveau sexe fort, Shenseea a choisi de s’imposer par son franc-parler. Ses textes sont crus, explicites, souvent sexuels, revendiquent le droit à parler de désir et de plaisir avec la même intensité que les hommes du dancehall. À cela s’ajoute une imagerie ultra sexy et provocatrice : clips sulfureux, chorégraphies suggestives, looks flamboyants. Son corps est devenu à la fois outil de pouvoir et marque de fabrique. Et ça fonctionne.
Héritière d’une tradition féminine audacieuse dans le dancehall, elle suit les traces de Lady Saw et Spice, tout en intégrant un style international qui mêle codes jamaïcains et ambitions pop mondiales.
On ne cherche pas à minimiser son flow certes accrocheur, ou remettre en cause une recette éprouvée par d'autres très grandes artistes dans bien d'autres styles. Mais cette provocation comporte des risques pour cette pépite du dancehall : elle peut être un piège, réduisant l’artiste à l’image d’une femme hypersexualisée et éclipsant son talent musical. Au-delà du risque personnel, cette hypersexualisation participe à la perpétuation de clichés pesants sur les femmes, où le corps devient trop souvent seul vecteur de valeur.
Pour autant, Shenseea est aujourd’hui la voix dominante du dancehall féminin en Jamaïque. Son audace et sa franchise s’inscrivent dans une tradition culturelle où le sexe se chante sans détour. Mais en devenant une artiste internationale, elle affronte un défi : que ses élans sulfureux la réduisent à « la fille crue qui s’y est cru ». Son avenir dépendra de sa capacité à transformer la provocation en langage artistique durable, au service d’une carrière qui ne se limite pas à l’image mais qui s’impose dans l’histoire mondiale de la musique.

Commentaires
Enregistrer un commentaire